Un texte de théâtre est avant tout fait pour être joué (par exemple, l'aparté se comprend mieux quand il est joué ; cela est vrai de tous les jeux de scène), il prend tout son sens lors d'une représentation car le metteur en scène livre son interprétation.
Le metteur en scène donne une interprétation, sa propre interprétation à travers la représentation qu'il propose.
Représentation -> recréation du texte de théâtre à chaque fois.
I) Plusieurs lectures et représentations d'une pièce.
Lire une pièce, c'est la mettre en scène dans sa tête. De Christian Rist
Chaque lecture fait place à une recréation du texte, qu'elle soit faite par un lecteur anonyme ou par un metteur en scène qui montre sa propre lecture de la pièce dans une représentation.
- respect du texte, des didascalies, des souhaits de l'auteur, du contexte avec le décor qui représente une époque.
Exemple : Samuel Beckett qui était attaché au respect scrupuleux des didascalies qui abondent dans son écriture dramatique. Il va même jusqu'à assister les metteurs en scènes dans les créations qu'ils donnent de ses pièces jusqu'à sa mort.
- Mais texte est incomplet et laisse part à une grande partie de liberté pour le metteur en scène. Le sens de la pièce n'est pas figé. Si le dramaturge écrit les répliques exactes et précises de ses personnages, le metteur en scène peut pourtant en dirigeant l'interprétation des comédiens considérablement infléchir le sens de l'œuvre.
Interprétation du texte variée, avec le jeu des acteurs … l'incomplétude du texte laisse la place et à l'interprétation personnelle de chacun et du metteur en scène et oblige celui-ci à prendre un parti -> intérêt de jouer des pièces plusieurs fois. Producteur d'un nouveau texte fidèle ou non à l'œuvre originelle.
Exemple : Carette nous livre sa propre interprétation (plus particulièrement la nostalgie d'un paradis perdue comme il le dit dans son entretien pour le site Théatre Contemporain) du texte de Tennessee Williams
- choix des costumes et des décors qui localise dans le cadre spatio-temporel l'action et le déroulement de la pièce. Les metteurs en scène choisissent tout cela en fonction du sens qu'ils veulent donner à leur représentation et du message qu'ils veulent faire passer.
Exemple : des costumes contemporains (jean, pull …) placeront la scène à notre époque et donneront à son message une valeur dans le présent.
- le texte prend vie grâce à la représentation dynamique.
Exemple : En attendant le songe d'Irina Brook d'après l'œuvre de William Shakespeare Le songe d'une nuit été. La représentation permet de donner toute l'ironie du texte grâce au travail du metteur en scène et aux jeux des acteurs.
Il y a autant de mises en scène que de représentations en fonction de tout le contexte de chaque représentation (public, acteurs, contexte de la société etc.) cf : Le Paradoxe sur le comédien de Diderot ; on est donc sûrement plus dans l’interprétation, encore une fois parce que le but ultime est la réflexion du public, la communication sur quelques thèmes forts.
II) Trahison, enrichissement et recréation ; le rôle du metteur en scène.
- devoirs d'un metteur en scène : transmettre le message de la pièce tel que l'a écrit l'auteur
Devoir vis-à-vis du public qui attend à la fois de la réflexion et du plaisir, et qui attend également de retrouver le texte qu'il aurait put lire.
- pouvoir du metteur en scène : marge de manœuvre dans chaque texte qui leur permet d'afficher leur propre vision du texte à travers la représentation.
Parfois tout est clair dans le texte et ils imposent en quelque sorte leurs propres opinions, d’autre fois, ce sont les auteurs qui laissent trop de points imprécis ou le public qui a des attentes bien particulières qui poussent acteurs et metteurs en scène à cette « trahison » apparente
Exemple : les différentes mises en scène de Don Juan de Molière. Le personnage principal est vue de différents points de vue selon les metteurs en scène. -> Marcel BLUWAL qui représente Don Juan comme un homme au cœur de pierre, froid et impassible. DELCAMPE qui accentue le côté farce de la pièce. Jacques LASSALE dont la mise en scène est beaucoup plus recherché avec des détails.
- trahison avec certaine liberté que prenne des metteur en scène en coupant certaine réplique ou en en ajoutant. Modification du texte qui appartient à son auteur. La mise en scène, sans être une plate explicitation du texte, doit toujours rester à son service et ne pas le faire mentir. En commettant un contresens, le metteur en scène défait l'œuvre écrite par l'auteur.
- recréation : Il est intéressant d'aller voir la même pièce de théâtre dans des mises en scène différente. Par exemple, pour monter Phèdre de Jean Racine, le metteur en scène peut choisir de costumer Phèdre d'une certaine manière, ce qui changera totalement la perspective de la pièce :
- Phèdre habillée en costume grec (un drapé) met la pièce sous le signe de l'Antiquité et le tragique est alors lié à la fatalité des dieux.
- Phèdre habillée en costume du XVII renvoie à l'actualité contemporaine au temps de l'écriture et le tragique est alors lié au jansénisme.
- Phèdre habillée en costume actuel (jean et pull) montre l'actualité de la pièce : le tragique est lié à l'amour, sentiment qu'on ne peut maîtriser.
Le metteur en scène doit se plier à certaine contrainte lié aux textes mais il garde une grande part de liberté pour monter une représentation d'une pièce. Il propose, avec les acteurs, à chaque nouvelle présentation une recréation et une redécouverte du texte originel. C'est en cela que les textes de théâtre, même Antique sont intemporels car soumis à la subjectivité du metteur en scène.
-> Texte et représentation indissociables.
-> Apport de la représentation après la lecture du texte.
-> Intérêt de voir plusieurs représentations d'une même pièce.